L´Hexaméron

Seuil 1990

4e de couverture

L’Hexaméron. Littéralement : six journées. Six écrivains d’aujourd’hui, dans l’ordre alphabétique, se sont distribué les jours d’une semaine : lundi (jour de la lune), mardi (jour de Mars), mercredi (jour de Mercure), jeudi (jour de Jupiter), vendredi (jour de Vénus), samedi (Jour de Saturne). Le Décaméron de Boccace était raconté en dix journées par sept femmes et trois jeunes gens. L’Heptaméron de Marguerite de Navarre en sept journées. L’Hexaméron de saint Ambroise (IVe siècle), inspiré, on s’en souvient, d’un précédent Hexaméron dû à Basile de Césarée, était constitué d’un ensemble d’homélies sur les six jours de la Création. Notre Hexaméron est le récit, par des voies différentes, de six journées de création littéraire. Une « Genèse », donc. Comme nous n’étions que six, la question du repos du septième jour ne s’est pas trouvée posée. Quand au sous-titre du livre, « Il y a prose et prose », libre à chacun de l’entendre comme il voudra, selon son humeur ou sa curiosité : c’est peut-être un simple constat, ou une provocation. Mais qui peut dire qu’il n’y a pas prose et prose ?

Les auteurs.

Extrait de la première journée (celle qui m’est échue)

Début

Ils tournent en moi, eux, la bâtisse comme emportés dans une mauvaise chaloupe, j’en reste envoûté. Robert, Clémentine, sa robe à voile. Je les distingue mal, à cause du vent qu’il fait dans ma mémoire. Ils tournent, s’escamotent à une porte, ressortent. La tonnelle a été foutue en l’air, on ne pénètre plus les pièces du fond. Propriété en vente, une affiche a été placardée à l’entrée. Robert, le gardien, expédie les affaires courantes, gratte, calfate, réduit les interstices, donne des coups de marteau, grille à huiler, volet qui déraisonne. J’aperçois sa chemise à carreaux, il tient un instrument malade, malade d’avoir trop copiné avec la terre, bêche ou fourche ? Il enfouit quelque chose avec lui-même dans la remise. Autour, c’est la vaste écorcherie du parc à l’abandon, nos imaginaires sous les feuilles en troncs serrés, l’herbe folle qu’on fauche métaphysique jusqu’au mur. La guerre vient juste de passer, nous laissant un peu éventrés sur le bord de la route, mais encore vivants.

Revue de presse

La critique des médias

Michel Chaillou