La fuite en Egypte

roman, Fayard 2011

Manuscrit donné à la Bibliothèque de la Ville de Nantes.

4e de couverture

Les deux héros de ce livre, perdus sur leurs routes innombrables, seront-ils, si l’autorité publique les rattrape, expulsés de France vers leur contrée d’origine ? Mais justement où se trouve-t-elle cette Petite Égypte des Roms, Gitans, Manouches, Tsiganes, Yénishes, cette patrie légendaire de tous ces gens du voyage qu’aucun géographe n’a jamais su jusqu’à ce jour situer ? Rêvera-t-on assez en leur compagnie pour en découvrir le chemin ? Voici donc l’histoire de cette fantasque virée qui me fonda, moi, le petit-fils de ce couple d’ombres vagabondes, qui s’efforce aujourd’hui de relater leurs aventures. Qu’on en juge ! Un soir d’automne, au début du siècle dernier, une jeune Nantaise du meilleur monde profitant du brouhaha de la brasserie sélecte où elle sirotait sa mélancolie en compagnie de son père, s’enfuit tout soudain avec l’artiste bohémien qui s’y produisait, y chantait. Était-ce pour ajouter un couplet inattendu à ses obscures rengaines ? Ils courent. Leurs cœurs sautent dans leurs poitrines, ils se tiennent par la main. Comment raconter leurs mains qui se nouent, se dénouent ? Comment ressusciter ce roman de la poussière que lèvent leurs pas voyageurs ? L’objet même de ce livre itinéraire sur la terre féconde !

Extrait (1ère page)

Ombres tardives

C’était la fin d’un siècle, le début du suivant. Ils s’éloignaient à deux sur la route mauvaise, lui d’un bon pas, elle… Que de choses à dire sur elle ! Le jour se levait à peine, ils avaient marché toute la nuit, lui dans la crainte qu’on les rattrape. Mais qui ? Mon Dieu qui ? Elle plus que lui eût pu nous l’apprendre, mais ses vingt ans pour l’instant n’en avaient cure. A la prochaine auberge, ils s’arrêteront. Après tout, ils pouvaient passer pour père et fille. Elle lui avait pris la main. Une main brune, tannée par les intempéries. Il avançait, heureux de sa bonne fortune, conquérir une telle jeunesse à son âge, ses vieux os n’y pensaient plus guère. Le devait-il à sa chevelure tombant sur ses épaules étroites, à un visage imberbe, d’un ovale presque féminin, à sa tournure évanescente de saltimbanque qui sait surgir à bon escient ? Il traînait dans son sac une tignasse rousse, car parfois lassé de sa guitare, il faisait le clown pour amuser la galerie, le clown Pernod dans les débits, estaminets de toute espèce qui jalonnaient depuis des années ses vagabondages. L’Ouest n’avait plus de secrets pour lui, la Bretagne noueuse, la Vendée et ses tendres marais vers lesquels justement ils descendaient.

C’était déjà l’automne, une saison brusque avec des retours de soleil et de soudaines averses qui les forçaient par moments à s’abriter.

à suivre

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Michel Chaillou